La nouvelle création de Christian Ubl, The way things go, éclot telle une bulle poétique et inspirée sur le plateau du Pavillon Noir
par Maryvonne Colombani
Publié le 14/02/24
Le chorégraphe Christian Ubl avait expérimenté pour la formation professionnelle Coline Le cours des choses, la manière dont s’enchaînent les faits les plus incongrus. Ce schéma renvoie à l’œuvre de Peter Fischli et David Weiss (1987) qui filme une succession ininterrompue de réactions en chaîne improbables : une roue de voiture tourne sur elle-même, déclenche la mise en mouvement d’un autre objet qui entraîne la mise à feu d’un mini artifice qui…etc. Le rapport à l’art est interrogé par cette forme qui ne doit pas sa beauté aux matériaux utilisés mais à l’alchimie étrange de leurs interactions.
Ce principe, ramené à la danse, a conduit Christian Ubl à s’entourer d’une architecte et scénographe, Claudine Bertomeu, et d’un compositeur musicien live et batteur, Romain Constant. Sur le plateau, des traits de couleur dessinent un espace rond ouvert sur des marques qui esquissent des points de fuite. Une série de boîtes blanches disposées comme une rangée de dominos prêts à être bousculés attend sagement sur l’un des bords du cercle.
Photo Antoinne Billet
Après l’entrée désordonnée des six danseurs et du musicien, la première boîte sera saisie par ce dernier qui la tendra à l’un puis à l’autre. La passation cocasse mêle sons et mouvements, étonnements, replis, désir de possession, peurs, amusements… Chaque personnage prend à travers la présence de l’objet une identité propre que soulignent les effets musicaux de la batterie arrangée et des intrusions électro. Le groupe court, s’évade, s’empare de la forme du cercle pour des rondes, des jeux qui tiennent parfois des exercices de théâtre : un geste en entraîne un autre, les danseurs à tour de rôle incitent l’autre à initier tel ou tel geste… L’expérimentation est mise en scène en une spirale qui pourrait être infinie, abreuvée de hasards et de rencontres poétiques. On sourit, on rit, on se laisse emporter dans cette esthétique minimaliste de l’éternel retour : les différents espace-temps sont scandés par une série de gestes récurrents, mains frappées, claquements de doigts… au bonheur de la légèreté qui s’achève en feu d’artifice !